Plusieurs grands laboratoires cherchent à détrôner le Viagra
Qui va donc détrôner le Viagra ? La question est peut-être prématurée mais un constat ne fait guère de doute : une bataille se prépare sur le marché en expansion occupé par la pilule bleue. A preuve, plusieurs grands laboratoires ont lancé les hostilités.
Certes, quatre ans après son lancement mondial, le Viagra (sildénafil) se porte bien. Ce médicament oral contre les dysfonctionnements érectiles n'a pas seulement sorti un laboratoire américain, Pfizer, de l'anonymat, mais il lui a permis d'encaisser 1,5 milliard de dollars de chiffre d'affaires annuel. Entre temps, Pfizer est devenu le premier laboratoire pharmaceutique mondial, et le Viagra, le médicament le plus connu au monde. Découvert par hasard, ce traitement a aussi contribué à créer un marché qui n'existait pas. Produit en France, à Pocé-sur-Cisse, près d'Amboise (Indre-et-Loire), il est expédié depuis ce site, baptisé Viagraland, dans 39 pays, dont les Etats-Unis.
Mais la situation de monopole dont le médicament profitait est progressivement remise en cause. Depuis le printemps, le Viagra doit compter, en France, avec la concurrence d'Ixense et d'Uprima, une même molécule agissant au niveau cérébral (l'apomorphine), mise au point par une association du japonais Takeda et de l'américain Abott. 200 000 boîtes de ces pastilles rouge brique ont été vendues – contre 950 000 boîtes de sildénafil –, ce qui les positionne comme une alternative thérapeutique. Le 29 octobre, Takeda a annoncé qu'il déposait une demande d'autorisation aux Etats-Unis, où il prévoit de lancer l'apomorphine fin 2003, si tout va bien.
Avec l'arrivée de quatre nouveaux entrants, la bataille pourrait bientôt faire rage. L'allemand Bayer, dont la pharmacie est en grande difficulté après le retrait du marché de son anticholestérol vedette en 2001, compte sur le lancement de Levitra (vardenafil) en 2003 pour retrouver l'espoir. Ce médicament, dont il a confié la commercialisation aux Etats-Unis au britannique GlaxoSmithKline, (GSK) serait un best-seller potentiel. En effet, selon Bayer et GSK, Levitra pourrait multiplier par plus de cinq la capacité d'un homme à avoir un rapport sexuel, grâce à une durée de vie plus longue dans l'organisme. A moins que la palme de la performance ne revienne à Cialis (tadalafil) qui sera lancé courant 2003. L'américain Eli Lilly et son partenaire de biotechnologies, Icos, ont prévenu que leur traitement agissait en un temps record : moins de vingt minutes.
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Un concurrent du Viagra pourrait être vendu sans ordonnance
Sanofi va solliciter les autorités sanitaires européennes et américaines pour commercialiser librement le Cialis, un médicament contre la dysfonction érectile.
Le groupe pharmaceutique français Sanofi a annoncé mercredi avoir obtenu d'Eli Lilly & Co les droits de commercialisation sans ordonnance du Cialis, un traitement de la dysfonction érectile développé par son concurrent américain. Mais cette évolution, qui concerne un marché lucratif, ne devrait pas voir le jour avant 2017 au mieux.
Sanofi devra au préalable obtenir l'autorisation des autorités médicales internationales pour pouvoir commercialiser librement ce concurrent du célèbre Viagra (du rival Pfizer), qui n'est actuellement disponible que sur ordonnance. «D'après les termes de l'accord, Sanofi acquiert les droits exclusifs pour solliciter l'approbation de Cialis sans ordonnance aux États-Unis, en Europe, au Canada et en Australie», indique un communiqué du groupe. Pour obtenir le feu vert des agences du médicament, Sanofi devra montrer que les hommes utilisant le Cialis sont à même d'utiliser la molécule de façon autonome, sans mettre leur santé en danger. Le Cialis, comme le Viagra, peut induire des risques cardiovasculaires.
Quatre facilitateurs d'érection sur le marché
Après l'obtention des approbations réglementaires requises, «Sanofi prévoit de mettre à disposition Cialis sans ordonnance après l'expiration de certains brevets» concernant le tadalafil, le principe actif du Cialis, poursuit le communiqué qui ne révèle pas les termes de l'accord de licence. L'expiration des brevets n'arrivera pas avant 2017, note toutefois le Wall Street Journal.
À ce jour, plus de 45 millions d'hommes dans le monde ont été traités avec Cialis, qui a généré plus de 10,2 milliards d'euros de ventes dans le monde depuis son lancement il y a plus de dix ans. Le Cialis a été approuvé par l'Agence européenne des médicaments en 2002, puis par les autorités sanitaires américaines (FDA) en 2003. Le comprimé a été approuvé dans plus de 120 pays dans des indications qui varient selon les États, et qui comprennent le traitement de la dysfonction érectile et la dysfonction érectile associée aux signes et symptômes de l'hypertrophie bénigne de la prostate.
Il existe quatre facilitateurs de l'érection commercialisés en France (Viagra, Lévitra, Cialis et Spedra), tous délivrés exclusivement sur ordonnance. À ce titre, la législation française interdit formellement leur vente en ligne. Le Viagra, qui dispose de formes génériques, et ses concurrents sont les médicaments les plus contrefaits au monde.
Eli Lilly mise sur Internet pour dynamiser les ventes de Cialis

Eli Lilly, le fabricant du Cialis, a décidé de commercialiser sa pilule vedette sur son site maisonmedicaledelamorlaye.fr.
Les victimes de troubles érectiles n'ont plus besoin de passer par une pharmacie. Eli Lilly, le fabricant du Cialis, a décidé de commercialiser sa pilule vedette sur Internet aux États-Unis, sur son site maisonmedicaledelamorlaye.fr.
Cela «permettra aux hommes souffrant de troubles érectiles d'acheter du Cialis (avec une ordonnance) depuis une source de confiance» et «en toute confidentialité» depuis «le confort de leur domicile», explique le laboratoire américain.
Eli Lilly, qui réalise 3,3 % de ses ventes avec le Cialis, soit 2 milliards de dollars, espère enrayer ainsi son recul sur le marché des troubles érectiles. Ce dernier s'élève à 5 milliards de dollars et la part de marché de Eli Lilly a reculé, de 46 % en 2007 à 39 % l'an dernier, selon IMS Health. Eli Lilly entend aussi lutter contre la contrefaçon, particulièrement développée sur cette gamme de traitements.
Une étude américaine estime que 97,5 % des sites de médicaments en ligne aux États-Unis sont illégaux ou vendent des médicaments contrefaits. Et Eli Lilly juge que la contrefaçon lui coûte des centaines de millions de dollars par an.
Pfizer et GSK, les laboratoires qui commercialisent les traitements concurrents Viagra et Levitra, devraient rapidement suivre Eli Lilly.
Onze pharmacies en ligne illégales visées par une plainte
L'Ordre national des pharmaciens a déposé plainte contre des sites illégaux de vente de médicaments, un mois après la parution du décret encadrant la pratique.
Moins d'un mois après la publication du décret autorisant la vente de médicaments en ligne, le Conseil de l'ordre des pharmaciens, qui n'a jamais caché ses réticences devant cette innovation, a déposé ses premières plaintes. La démarche vise 11 sites basés à l'étranger qui «trompent le consommateur en se faisant passer pour des sites français agréés» et le mettent en danger en vendant «des produits contrefaits», selon la présidente de l'ordre, Isabelle Adenot.
En France, la vente de médicaments en ligne est réservée aux sites appuyés sur une officine ayant pignon sur rue. Ils doivent recevoir une validation de l'agence régionale de santé et être inscrits sur le site internet de l'ordre des pharmaciens. Les 11 sites poursuivis par l'ordre des pharmaciens seraient belges, espagnols, voire russes. L'identité réelle des propriétaires est difficile à déterminer car les entrepreneurs agissent au travers de sociétés écrans, rapporte mercredi Le Parisien.
Des noms de domaine rachetés
La vente illégale de médicaments en ligne est un fléau déjà ancien à l'échelle d'Internet. La plupart du temps, les produits proposés sont contrefaits, et les faux stimulants sexuels, type Viagra ou Cialis, qui nécessitent pourtant une ordonnance, figurent en tête des achats. L'un des sites poursuivis par le Conseil de l'ordre propose ainsi du Sibutril, un médicament interdit en France depuis 2010 en raison de graves effets secondaires.
La supercherie va même plus loin, car certains de ces noms de domaine correspondent à des pharmacies réelles et légales. Un pharmacien du Doubs, Jean-Paul Caretti, raconte ainsi dans Le Parisien que l'un des sites poursuivis, utilise son ancien nom de domaine qui a depuis été racheté par des Russes, sans qu'il en soit informé. À l'origine, son site, ouvert en 2008, n'avait pour finalité que d'informer ses clients sur les horaires d'ouverture de l'officine. Jean-Paul Caretti a résilié son abonnement auprès de son hébergeur en 2010. Dès lors, le nom de domaine retombe dans le domaine public et peut être racheté par n'importe qui pour 45 euros par an.
Les gendarmes de l'office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique (Oclaeps), qui ont repris le dossier, auraient découvert, à la suite du signalement d'Isabelle Adenot, «plusieurs dizaines d'autres sites illégaux», indique au Figaro la présidente de l'ordre.
44 e-pharmacies légales
Le président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France, Philippe Gaertner, n'est «malheureusement» pas surpris par l'existence de pareille tromperie. «Dès lors qu'on autorisait la vente de médicaments en ligne, on savait que certaines personnes chercheraient à contourner la loi. C'est pourquoi nous n'y étions pas favorables», rappelle-t-il au Figaro.
Selon lui, il est très difficile pour l'internaute de s'assurer de la légalité d'un site. «Il faudrait qu'il aille d'abord sur le site visé, puis qu'il se rende sur le site du Conseil de l'ordre des pharmaciens pour vérifier qu'il y est recensé. Or on sait bien que les internautes ne fonctionnent pas comme cela», souligne-t-il.
Philippe Gaertner estime que la vente de médicaments en ligne ne répond pas à un grand besoin en France où les 22.500 pharmacies sont bien réparties sur le territoire, contrairement à d'autres pays européens. On recense à ce jour 44 e-pharmacies légales en France.